Gène MDR1

Gène MDR1 : parlons-en

Gène MDR1

Gène MDR1 …

Et non, il n’y a pas de quoi être mort de rire ! 
Le sujet est souvent flou chez les propriétaires de chiens, alors je vais essayer de vous clarifier tout ceci !
Il est d’abord important de comprendre comment fonctionne l’ADN et la génétique pour comprendre le sujet du Gène MDR1

1. Qu’est-ce que l’ADN, petit rappel en quelque mots…

L’ADN (Acide DésoxyriboNucléique), qui constitue les chromosomes, porte les gènes (20 000 environ).

Les gènes sont eux aussi présents en 2 copies. En effet une copie venant de la mère et une copie venant du père. Le gène MDR1, comme les autres, comporte 2 copies !

La molécule d’ADN, se trouve dans toutes nos cellules. C’est en quelque sorte le « plan détaillé » de notre organisme qui est aussi appelé code génétique. Il contient toutes les informations nécessaires au développement et au fonctionnement du corps.

L’ADN est constitué de quatre éléments complémentaires, les nucléotides : l’adénine, la thymine, la guanine et la cytosine : A, T, G, C.

Le gène, lui, est un morceau de cet ADN qui correspond à une information génétique particulière qui code pour une protéine unique, et qui code donc une caractéristique du corps (couleurs des yeux, couleur des poils etc…)

C’est donc une très petite portion de chromosome. Comme nous, les chiens possèdent chaque chromosome en double, chaque gène est également présent en double dans nos cellules. Ces deux copies d’un même gène, appelées allèles, sont le plus souvent différentes : une d’origine paternelle et une d’origine maternelle.

2. Qu'est-ce que le gène MDR1 ?

MDR signifie Multidrug Resistance Gene. En gros, et en français, le gène MDR1 va coder une protéine qui permet à l’organisme du chien de résister aux drogues sans en endommager son organisme.
Le gène MDR1 permet donc la synthèse d’une protéine, appelée glycoprotéine P, ou P-gp. Cette protéine se situe dans les cellules endothéliales qui constituent la barrière hémato-méningée.
Dit comme ça, ça fait un peu flipper, mais vous allez voir, ce n’est vraiment pas si compliqué à comprendre.

Le cerveau baigne à l’intérieur de la boite crânienne dans du liquide. Ce liquide est appelé le liquide cérébro-spinal. Tout autour, il y a des capillaires, qui sont des petits vaisseaux sanguins. Et au milieu, vous imaginez comme une barrière. Cette barrière est constituée de cellules appelées les cellules endothéliales.

Mais … pourquoi une barrière ?

Et bien, tout simplement pour éviter de laisser passer ce qui se trouve dans le sang, vers le cerveau. Dans le sang, il y a des nutriments et minéraux dont le cerveau a besoin, mais il y a aussi des bactéries, de virus… et éventuellement des drogues à la suite d’un traitement ou d’une anesthésie. C’est pour cela qu’il y a cette barrière, qui permet à certaines choses de ne pas passer dans le cerveau, ce qui risquerait gravement de l’endommager.

Il y a donc une barrière entre le sang et le cerveau. Tout ce qui entre dans le cerveau depuis le sang, ou sort du cerveau vers le sang est filtré par les cellules endothéliales présentes dans les vaisseaux sanguins. Les déchets sortent et les aliments rentrent, mais les bactéries, les toxines, les médicaments ne doivent pas entrer dans le cerveau.

C’est lors de ces échanges que la glycoprotéine P intervient. Elle agit comme une petite pompe de reflux qui exclue l’accumulation de médicaments présente dans le cerveau, vers le sang afin de ne pas l’empoisonner.

C’est le gène MDR1 qui code la fabrication de la glycoprotéine P. En cas d’altération du gène (mutation du gène MDR1, la synthétisation de la glycoprotéine P ne se fera pas comme il faut, et sa fonction de pompe de reflux se fera anormalement, voire pas du tout.

Dans ce cas les drogues accumulées dans le cerveau ne seront plus expulsées normalement vers le sang et continueront de s’accumuler anormalement dans le cerveau du chien.
Certaines molécules médicamenteuses sont normalement expulsées par la glycoprotéine P. Dans le cas d’un chien qui a un gène MDR1 muté, si on lui administre un médicament habituellement expulsé par la glycoprotéine P, son gène étant défaillant, la pompe de reflux sera défaillante et la molécule ne sera pas expulsée normalement, et se trouvera en quantité anormalement élevée dans le cerveau du chien.

Le cerveau du chien sera donc atteint de surdosage de cette drogue et arrêtera de fonctionner normalement, on parlera de neurotoxicité.

3. Les statuts du gène MDR1 chez le chien

Nos gènes sont présents en deux exemplaires dans nos cellules, un brin venant de la mère, et un brin venant du père. En génétique, parfois un des deux gènes de la paire, est défaillant, et le gène « sains » peut compenser les défaillances de l’autre, ou pas.

Dans le cas du gène MDR1, le gène sain ne compensera pas entièrement les défaillances du gène défaillant.

  • Chien porteur de 2 gènes MDR1 normaux (+/+) : sa pompe de glycoprotéine P fonctionne bien, le chien n’aura pas de restriction médicamenteuse puisque les toxines seront évacuées de son cerveau normalement.
  • Chien porteur de 2 gènes MDR1 défaillants (mutés) (-/-) : sa pompe de glycoprotéine P ne fonctionne pas du tout, et la prise de certaines molécules médicamenteuses pourrait s’avérer fatale pour le chien.
  • Chien porteur d’un seul gène MDR1 muté (+/-) : sa pompe de glycoprotéine P ne fonctionne que partiellement (50%) de ces capacités. Son risque d’intoxication sera moindre que les individus (-/-) mais pas nul.

Bon à savoir :

Un individu (+/+) transmettra automatiquement un gène MDR1 sain (+)

Un individu (-/-) transmettra automatiquement un gène MDR1 muté, défaillant (-)

Un individu (+/-) transmettra ou un gène sain (+) ou un gène MDR1 muté (-)

Il est donc préférable de connaître les statuts des gènes MDR1 des parents, lors des mariages de chien. Deux parents (+/+) auront automatiquement des chiots (+/+)

Il est donc préférable d’éviter de faire reproduire des individus ayant 1 ou 2 gènes mutés (-)

4. Quelles sont les races de chiens les plus impactées par cette mutation ?

Afin de créer « des races » les éleveurs ont, au fil des siècles et des années, sélectionné des individus, sur des critères de beauté, de caractère, de résistance, d’endurance… Ils ont croisé et recroisés les individus entre eux afin d’obtenir des chiens correspondants aux critères voulus pour LA race.

Créant ainsi un taux non négligeable de consanguinité entre les individus d’une même race. La consanguinité entrainant des prédispositions génétiques à certaines maladies, ou des sensibilités dues à des gènes mutés.

C’est pourquoi, certaines races sont plus impactées par la mutation du gène MDR1.
Selon une étude publiée par le laboratoire Antagène, et concernant les chiens de la population française, le chien de race Colley arrive en pôle position des chiens porteur du gène muté (85%) dont 50% d’homozygotes -/-.
Le berger australien et le shetland arrivent à égalité avec 54% et 52% porteurs de gènes mutés, dont 10% d’individus homozygotes -/-.
Le border collie quant à lui, arrive loin derrière avec seulement 3% d’individu porteur du gène muté.

D’autres races peuvent également être porteuses du gène muté comme le berger blanc suisse, le bobtail ou encore le bouvier bernois. Ces données varient en fonction des pays.

5. Quelles sont les médicaments et les molécules à éviter ?

La liste est longue ! Et les médicaments variés, à tel point que certains propriétaires de chiens de race à risque ne savent plus quoi donner à leur chien pour éviter tout risque d’intoxication.

La molécule la plus connue est l’ivermectine, Cette molécule est notamment utilisée dans les traitements anti parasitaire des animaux de bétail, et aussi chez le cheval. Il arrive que certains chiens, porteur de gène mutés se soient intoxiqués après avoir mangé du crottin de cheval. C’est pour cela qu’il est très important de connaître le statut du gène MDR1 de son chien.

Pour la petite histoire,

En tant que cavalière propriétaire d’un cheval et d’un berger australien il était obligatoire pour moi de connaître le statut MDR1 de Ju ! Son papa étant +/+ et sa maman +/+, de part sa génétique il est obligatoirement +/+ donc indemne de gène muté et sa petite pompe de glycoprotéine P fonctionne à plein régime !
Donc pas de souci de ce côté-là, mais ce n’est pas une raison pour manger du caca par kilo ! Quoi que…

Vous pourrez trouver une liste très complète des molécules à risques ici http://www.collie-online.com/colley/mdr1/index.php.

Pour faire simple et concis, voici une liste non exhaustive des molécules les plus dangereuses qui est publiée par Antagène :

– Molécules à proscrire : ivermectine, lopéramide, emodepside, doramectine, abamectine.

– Molécules à éviter : milbémycine, moxidectine, spiramycine,

– Molécules avec précautions obligatoires : métoclopramide, métronidazole, spinosad,

– Molécules avec précautions à prévoir : acépromazide, butorphanol, vincristine, vinblastine, doxorubicine, dompéridone.

6. Cas des antiparasitaires

Ces molécules peuvent être présentes dans certains antiparasitaires, que ce soit contre les puces et les tiques ou des vermifuges contre les vers internes. Ces antiparasitaires peuvent se trouver en pharmacie (en libre-service) ou directement chez votre vétérinaire.

Si vous achetez vos antiparasitaires en libre-service, en pharmacie par exemple, il semble évident d’être informé des molécules les plus couramment utilisées afin d’éviter tout risque d’empoisonnement du chien (surtout si on ne connaît pas le statut du chien au niveau de sa sensibilité MDR1 et qu’il appartient à une race à risque).

Cinq molécules sont concernées. Trois appartiennent au même groupe que l’ivermectine dont nous avons parlé plus haut (Lactones macrocycliques) et les deux autres à une autres groupe.

  • La milbémycine oxine : utilisé comme antiparasitaire interne contre les vers ronds et en prévention contre la dirofilarose (maladie du vers du cœur). Cette molécule est très rependue dans les antiparasitaires de type « cachet ». On la trouve seule (Interceptor) ou combinée avec d’autres molécules (Milbémax, Milpro, Milprazon…). On la trouve également dans les fameux cachets anti-tiques et puces sous le nom de NEXGARD SPECTRA. Il est donc très, très recommandé de connaître le statut MDR1 de votre chien avant de lui donner ce genre de médicament.

Outre le fait que ce médicament peut être mortel pour les chiens porteurs du gène muté, il n’en reste pas moins un poison pour les autres chiens. Vous viendrez t’il à l’idée de donner à boire la bouteille d’anti-poux à votre enfant ? Je ne pense pas… Et vous ? le prendriez vous ce cachet pour éviter d’attraper des tiques dans les bois lors de vos balades dominicales ?

  • La salamectine : Molécule anti parasitaire notamment utilisée comme anti-puces, mais également en prévention de la dirofilarose (maladie du vers du cœur). Elle se présente sous forme de pipettes à mettre directement sur la peau du chien.
  • La moxidectine : Elle est de la même famille que la milbémicyne et est active contre les parasites internes et externes. On la trouve sous forme de pipette à mettre directement sur la peau du chien (ADVOCATE)
  • Spinosad : C’est un antiparasitaire externe utilisé en cas d’infestation de puces. Il se présente sous forme de comprimé à faire avaler au chien.
  • L’émodepsine : C’est un antiparasitaire qui agit contre les vers ronds du tube digestif. On la trouve sous forme de cachets à faire avaler au chien (PROFENDER).

Concrètement pour les vermifuges et antiparasitaires,

Molécules interdites chez les individus ayant au moins un gène muté

Interceptor, Milbemax, Sentinel, Program, Guardian, Cardomec, (prévention de la Dirofilariose cardiaque chez le chien), Advocate.

 

Molécules autorisées

Buccalox, Stromiten, Gelminthe, Dovénix, Flubenol, Telkan, Telmin KH, Ascatene, Perhelmin, Polyverpat, Vitaminthe, Polyverkan, Dolthène, Dolpac, Ascapipérazine, Opovermifuge, Plurivers, Soluverm, Coophavet, Strongid, Combantrin (usage humain, sirop utilisable chez les chiots), Droncit, Plativers, Drontal, Panacur.

7. Quels sont les symptômes en cas d’intoxication (chien gène MDR1 muté) ?

Les molécules telles que l’ivermectine, lactones macrocytaires cités ci-dessus ne sont pas ou peu pompées hors du cerveau par la glycoprotéine P, et donc s’accumulent et entraîne des symptômes d’ordre neurologiques. On pourra observer :

  • Un animal prostré, dans son coin, ne voulant plus bouger et semblant triste
  • Une hypersalivation et/ou des tremblements. Le chien bave et semble désorienter
  • Des convulsions
  • Une ataxie, incapacité de coordonner ses propres mouvements, entrainant des chutes de l’animal et une incapacité à se tenir sur ces pattes
  • Un ralentissement du rythme cardiaque appelé bradycardie
  • Les pupilles du chien peuvent rester dilatée, appelé mydriase
  • Une cécité

Tout ces symptômes pouvant entraîner un ralentissement de la respiration, du rythme cardiaque, un coma, puis la mort.

Bien entendu, plus la dose consommée est élevée et plus le risque est élevé.

8. Que faire en cas de prise accidentelle ?

  • Si le chien a avalé un médicament qu’il n’aurait pas dû (contenant une molécule dangereuse pour lui).

Dans tous les cas il faudra vous rendre chez votre vétérinaire de manière urgente.

Si le chien a avalé le produit il y a moins d’une heure, et qu’il ne présente pas de troubles neurologiques, le vétérinaire lui fera une injection visant à le faire vomir.

Si cela fait plus d’une heure, cela ne sert à rien de le faire vomir car le médicament n’est déjà plus dans l’estomac et est déjà passé dans le tube digestif. Le vétérinaire donnera alors du charbon actif au chien, ce qui favorisera l’élimination des toxines par les selles. Le charbon enduit le tube digestif, ce qui réduit le passage des toxines du tubes digestif vers le sang et donc vers le cerveau, et favorisant son élimination rapide par l’autre extrémité du tube digestif (Anus).

  • Si le chien a reçu une pipette sur sa peau (voie externe)

Il vous faudra laver rapidement le chien de manière énergique de façon à éliminer un maximum de produit et que sont passage dans le sang soit diminué.

 

  • En cas de symptômes graves tels que des convulsions, un coma…

Il faudra attendre et surveiller (Wait and see) que cela passe et croiser les doigts… et les pattes… Cela peut durer plusieurs jours. Durant cette période, le vétérinaire pourra poser une perfusion afin de maintenir le chien bien hydrater, ce qui favorise l’élimination des toxines présentes dans le sang. Le vétérinaire traitera en symptomatiques, c’est-à-dire au fur et à mesure que les symptômes apparaissent (anti vomitifs, protecteurs gastriques, nourriture par sonde, soutient du système cardiaque et respiratoire…).

 

9. Que faire en prévention ?

TESTER est la première des choses à faire, surtout si vous avez un chien qui appartient à une race à risque. Si vous connaissez le statut du gène MDR1 des parents de votre chien, il pourra vous être simple de déduire si votre chien est porteur d’un gène muté ou non.

Deux parents au statut +/+ engendrerons une descendance automatiquement +/+ donc là pas de problème.

En revanche si l’un des parents possède un gène muté, qu’il soit +/- ou -/-, il y a un risque de transmission à la descendance. Il sera donc fortement recommandé de faire tester votre chien.

Il est vraiment indispensable pour son bien de faire tester votre chien, en effet, en cas d’urgence, si l’on ne connait pas le statut du gène MDR1 du chien, le vétérinaire peut se retrouver coincé et ne pas savoir quelle molécule il peut administrer au chien ou pas.

De plus, si vous savez que votre chien est homozygote -/-, vous pourrez le signaler dans son carnet de santé, en le notant en gros et en couleur ! Et ainsi penser à le rappeler à chacune de ses visites vétérinaires. Cela pourra entre autres, éviter qu’un antiparasitaire, ou tout autre médicament inadapté lui soit administrer, avec toutes les conséquences que vous connaissez maintenant.

En outre, on évitera pour le bien de la race, de faire reproduire un individu avec des gènes mutés, ce qui ne serait pas bénéfique pour l’avenir de la race.

  • Où faire le test du gène MDR1 ?

Vous pouvez vous rendre tout simplement chez votre vétérinaire et lui demander de réaliser le test pour la mutation du gène MDR1 surtout si votre chien fait parti des races à risque comme citées plus haut dans notre article.

Vous pouvez aussi en trouvez sur internet, il y a quelques laboratoires en France qui réalisent ce test, comme le Laboratoire Antagene.

Voici un article qui me semble complet, qui pourra vous en dire plus à ce sujet : ici

Personnellement je préfère la première option du vétérinaire, car vous, n’aurez à vous occuper de rien, mais vous aurez le libre choix.

  • Comment est fait le test du gène MDR1 ?

Cet examen est un test buccal qui est indolore et sans risque pour le chien. Le vétérinaire passera un écouvillon stérile (petite brossette) dans la gueule du chien, et lui frottera la joue avec, afin d’y récupérer son ADN. Si vous décidez de commander un test sur internet, vous recevrez un KIT, avec une notice qui vous expliquera la marche à suivre afin de réaliser vous-même le prélèvement.

Eviter de préférence de donner à manger au chien avant la réalisation de l’examen.

  • Combien coûte le test du gène MDR1 ?

Comptez environ 75 euros pour un test du gène MDR1 en kit acheté sur internet, un petit plus chez votre vétérinaire étant donné qu’il s’occupe de toutes les formalités d’envoi et de réception des résultats.